Lexique :
* Voiture volante.
** Pantalon.
Cette histoire se déroule en 2450. Sur terre, il n’y a plus qu’un seul pays qui se nomme l’Empire constitutionnel. La vie y est simple et belle lorsqu’on y respecte les lois très nombreuses et surtout l’Empereur. L’humanité a découvert comment dépasser la vitesse de la lumière en 2100 et a colonisé le système solaire. Toutes les planètes telluriques ont été transformées. Sur celles-ci, les humains ont réussi à obtenir la même gravité que sur terre ainsi que le même mélange gazeux permettant de recevoir des colons. Mercure, très près du soleil, sert de panneau photovoltaïque géant. Une petite colonie d’humains se relaient sous la surface pour faire fonctionner cette machine. Vénus et Mars sont des colonies réservées à l’élite, la vie y est agréable et le climat parfait, bien qu’il fasse plus chaud sur Vénus. Pluton sert quant à elle de pénitencier, c’est un caillou froid où la lie de l’humanité est retenue à vie pour le bien de l’Empire.
Les usages sont très importants dans cette société où l’Empereur dirige absolument tout. Quand une personne parle de l’Empire pour quelque raison que ce soit, les mots << que vive l’Empereur >> doivent clôturer la phrase. Lorsque quelqu’un prononce le titre où le nom de l’Empereur, la formule << qu’il vive une vie longue et heureuse >> doit être dite. Lorsque Sa Sainteté décide de venir parler à un de ses sujets, << Saint-Empereur, que longue soit votre vie >> est la formule adéquate. Le premier manquement à une de ces règles, est synonyme de peine d’enfermement de premier degré dans des prisons qui se trouvent sur terre et doivent remettre dans le droit chemin les citoyens s’en écartant. Le deuxième écart est quant à lui égal à l’enfermement dans les cellules plutoniennes.
Histoire :
Le soleil se levait sur Vichy, la capitale de l’Empire. Quelques rayons de lumière vinrent éclairer le mur de la chambre de Méric, qui ouvrait doucement les yeux. C’était le 4 octobre, le jour de la fête nationale et il allait avoir une longue journée. Il avala rapidement un café et fila au commissariat. Une fois là-bas, il avait une réunion dans laquelle il devait parler à ses équipes. Il devait aussi rencontrer son nouvel équipier, fraîchement sorti de l’école de police. Comme tous les matins il passait à côté des cellules de transition, les personnes jugées coupables devant terminer leurs jours sur Pluton y étaient retenues jusqu’à leur départ. Il entra dans la salle de réunion où l’attendaient ses subalternes, qui se levèrent dès son arrivée. Méric était impressionnant : Il avait cinquante-cinq ans, mesurait presque deux mètres et avait des épaules de catcheur. Il était chauve et avait la peau très pâle. Il prit la parole :
<< Messieurs asseyez-vous ! Aujourd’hui nous avons du pain sur la planche. c’est le tricentenaire de la création de notre bel Empire ! <<que vive l’Empereur>>. Tous les préfets, les sénateurs et les bourgmestres seront présents. Je vous ai donné les directives hier. Je vous souhaite bon courage pour la journée vous en aurez besoin ! Que vive l’Empereur >>
Tous les policier se levèrent et crièrent à leur tour : << Que vive l’Empereur >>
Méric sortit de la salle et alla dans son bureau où l’attendait le divisionnaire et un jeune homme d’une trentaine d’années. Son supérieur prit la parole :
<< Commissaire Lefatte Bonjour. Voici Philopé Tarmis votre nouveau coéquipier. Il est arrivé major de sa promotion et a eu la meilleure note jamais obtenue.
– Bonjour ! Eh bien nous verrons ce qu’il vaut sur le terrain !
– Nous verrons effectivement. J’ai parlé avec lui, il devrait vous plaire !>>
Le divisionnaire sortit en laissant seuls les deux policiers, Philopé prit la parole.
<< Commissaire ! Je suis heureux d’être là avec vous. Votre réputation vous précède, c’est le terme juste.
– Merci mais je ne suis pas là pour faire un concours ou présenter un tableau de chasse ! Mon respect et ma confiance ne se gagnent pas facilement. T’as fait tes preuves à l’école, j’aimerais que tu les fasses aussi sur le terrain. J’ai pour toi une mission de deux heures qui devrait te familiariser avec ton travail !
– Et c’est quoi ?
– Tu vas aller surveiller les départs pour Pluton, c’est demain, ils sont sur les nerfs.
– Mais ! bon je veux bien… répondit Philopé avant de se faire couper la parole
– Je préfère être clair avec toi. Quand je te donne un ordre, c’est pas la peine de me dire que tu veux bien.
– Vous avez l’air moins con sur les photos Monsieur !
– Va prendre ton uniforme à l’accueil et cesse de faire de l’humour, je ne suis pas d’humeur. >>
Le jeune policier sortit du bureau en laissant seul le commissaire.
Une heure et quart plus tard un agent de police ouvrit brutalement la porte du bureau de Méric.
<< Commissaire vite ! Il y a un problème à la transition.>>
Méric courut alors jusqu’aux cellules où il vit son jeune équipier au milieu d’une pièce, un homme était à ses pieds.
<< Mais qu’est-ce que t’as foutu !
– Rassurez-vous commissaire, il n’est pas mort, juste un peu sonné. Il s’est jeté sur moi, il voulait me voler mon uniforme je crois.
– Tu crois mal mon jeune ami, c’est Jason Lefourbe dit le pointeur. S’il a commencé à baisser ton futal **, c’est sans doute pas pour te le piquer !
– Quoi ! comment ça ! mais ! ah mais c’est dégueulasse! Le policier en place m’a dit que c’était lui en particulier que vous vouliez que je surveille ! Mais vous êtes vraiment une belle ordure !
– Oh petit pas d’inquiétude, reprit le commissaire. Il y avait cinq surveillants Plutoniens juste à la sortie de la pièce, il ne te serait pas arrivé grand-chose. Je dois avouer que tu sais bien te battre, pour arriver à maîtriser Jason tout seul…>>
Il n’eut pas le temps de finir sa phrase que le jeune homme lui donna un énorme coup de poing sous le menton. Surpris, le commissaire tomba par terre. Il se releva rapidement et gifla le jeune homme qui finit au sol de suite. Méric lui dit alors :
<< T’as un bon uppercut l’ami, mais ma gifle est légendaire. Je t’attends dans mon bureau dans cinq minutes j’ai à te causer.>>
Le commissaire tourna les talons et sortit de la pièce. Le jeune homme se rendit comme demandé dans le bureau de son nouveau coéquipier.
<< Ecoutez-moi Lefatte ! Votre comportement est inadmissible et totalement débile ! Il est beau le commissaire le plus décoré le l’Empire << que vive l’Empereur >>. Je suis votre équipier et non votre subalterne !
– Oh oh ! calme-toi l’ami. C’était un test pour savoir ce que tu valais, il ne te serait rien arrivé dans cette cellule, ça je peux te le promettre. Les surveillants Plutoniens ne sont pas vraiment des tendres et étaient là pour t’aider, même si tu ne les voyais pas. Dans les rues de Vichy il y a des gens très bien et aussi de belles ordures qui n’ont leur place que dans une cellule de l’autre côté du système solaire. Ces gens tu vas devoir les affronter régulièrement. Bref, je te félicite pour ta défense, Jason n’est pas un enfant de chœur. Pour l’uppercut que je me suis pris, disons que je l’ai mérité et qu’on est quittes ! >>
Méric tendit la main au jeune policier. Le visage fermé du début de la matinée s’était transformé en sourire. Philopé serra alors la main du commissaire. Dans son esprit, tout était devenu clair et Lefatte avait organisé cela seulement pour le tester.
<< Bon ! dit le commissaire, nous sommes attendus au palais. Nous devons rencontrer la garde impériale et planifier les derniers détails. >>
Les deux hommes s’en allèrent. La pogarde* du commissaire était garée juste devant le commissariat. Arrivés au palais un homme vint les accueillir. Il avait l’âge du commissaire et une grosse chevelure grise superbement peignée. Il n’était pas très grand mais semblait en bonne forme. Philopé le reconnut de suite, il s’agissait de Mathéo Balzi, le chef de la garde impériale.
<< Méric ! Ça me fait plaisir de te revoir.
– Oui Mathéo, moi aussi. Laisse-moi te présenter mon nouvel équipier Philopé. Philopé, voici Mathéo on s’est connus au lycée, on faisait des concours de belote ensemble.
– Bonjour Philopé. Bon, on est pressés il faut qu’on regarde où tu placeras tes hommes.
– Pourquoi ne lui avez-vous… Philopé eut la parole coupée par le commissaire.
– Arrête de me vouvoyer !
– Bon ok. Pourquoi ne lui as-tu pas dis avant ? on est le 4 octobre et la cérémonie c’est ce soir.
– Pourquoi rétorqua Mathéo ! Parce que ce vieux Méric a peur des fuites. Même à moi il ne fait pas confiance ce vieux bougre !
– Jusqu’à présent aucun échec. J’ai planifié des dizaines de cérémonies et il ne s’est jamais rien passé. Alors plutôt que de critiquer, prenez-en de la graine.
– Ne boude pas Méric, tu sais bien que t’es le meilleur, sans quoi l’Empereur ,Qu’il vive une vie longue et heureuse, ne ferait plus appel à toi. >>
Le trio arriva devant une carte de la ville. Le commissaire dit :
<< Mes hommes se tiendront près du cortège qui arrivera par le pont de Bellerive. Il passera par l’avenue Aristide Briand, la place Saint Louis, la rue Sormin pour terminer son trajet sur le boulevard Sichon où la cérémonie aura lieu. J’aurai des hommes à chaque intersection des tireurs d’élite sur tous les toits environnants.
– Ok répondit Mathéo. Ça me semble pas mal comme plan. Les tireurs d’élite sont à mon avis en trop, mais mieux vaut trop que pas assez. >>
Les deux policiers saluèrent leur hôte et se dirigèrent vers la sortie du palais. Une fois dans la pogarde, ils prirent la direction d’un restaurant. Une fois assis un serveur vint à leur table :
<< Messieurs bonjour, bienvenue aux délices Vichyssois. Que désirez-vous ?
– Un ragout de chevreuil pour moi, et toi Philopé ?
– Moi pareil merci. je voudrais un verre de vin, avez-vous de la cuvée impériale ?
– Bien entendu répondit le serveur avant de s’en aller vers les cuisines.
– Pourquoi avoir placé des tireurs d’élite sur les toits ? demanda Philopé.
– Cette année il y a eu une recrudescence des attaques verbales contre l’empire << longue vie à l’Empereur >>. Des menaces qui pourraient mener à des attaques physiques sur sa personne. Bien que la peine encourue lorsqu’on critique le régime soit l’emprisonnement à vie sur Pluton, ça n’arrête pas les anti-système. De mon temps, ça n’existait pas… enfin, c’était une autre époque. >>
Une fois le déjeuner terminé, les deux hommes prirent place dans la pogarde. L’écran de communication s’alluma et le visage d’un homme apparu, il dit :
<< Appel à toutes les patrouilles. Emeute boulevard Gambetta qui peut s’y rendre.
– Commissaire Lefatte, on est à côté. On y va !>>
Les gyrophares s’allumèrent et le véhicule s’envola pour arriver quelques secondes après près du lieu de l’émeute. Une trentaine de personnes s’en prenait à la statue de l’Empereur Oris IV, mort vingt-cinq ans auparavant. Le commissaire lança la sirène juste avant d’atterrir, ce qui avait fait fuir une partie des perturbateurs. Deux d’entre eux souhaitaient visiblement l’affrontement ; le plus grand des deux se mit à hurler en courant vers les policiers :
<< Flicaille de merde ! Brûlez en enfer vous et votre Empereur ! >>
Il portait une bombe sur lui. Méric eut juste le temps de dégainer son arme et de lui tirer dans la gorge. L’homme était à terre et se vidait de son sang à une vitesse fulgurante, il rendit son dernier souffle quelques secondes plus tard devant le regard médusé de son compagnon, qui leva aussitôt les bras au ciel. Philopé s’approcha de l’émeutier et lui dit :
<< J’espère que t’es pas trop accro au soleil. Parce que là où tu vas y en aura pas de trop. >>
L’homme fut emmené au commissariat en attendant son jugement ; le verdict serait sans aucun doute la réclusion plutonienne. L’heure « H » arrivait à grand pas et le commissaire, son adjoint et le chef de la garde impériale était réunis près du cortège de l’Empereur Méros II. Le souverain se leva de son siège et se rendit à la rencontre de Mathéo.
<< Saint-Empereur, que longue soit votre vie >>, dit alors le trio.
– Merci messieurs. Commissaire Lefatte comme tous les ans je m’attends à une sécurité digne de cette cérémonie.
– Saint-Empereur, comme à chaque fois, je serai à la hauteur de ma mission, soyez-en certain.
– Qui est ce jeune homme ? Demanda l’Empereur ?
– C’est mon nouveau coéquipier, il remplace Maro qui a été tué dans une émeute il y a deux semaines.
– J’en ai entendu parler répondit le souverain, il est tombé dans l’Allier je crois ?
– Oui rétorqua Lefatte, on n’a pas encore retrouvé le corps. Maintenant, s’il a dérivé il doit déjà être dans l’Atlantique. C’était un policier comme on n’en fait plus.
– Je me rappelle effectivement. Et vous jeune homme, vous sentez-vous à la hauteur. Comment vous appelez-vous ?
– Philopé Tarmis votre altesse, j’espère être à la hauteur, car vous servir est un honneur.
– Oh ! J’ai entendu parler de vous. Bravo pour ce parcours brillant à l’Ecole de Rodez, la meilleure note jamais obtenue. Je serais heureux de vous recevoir au palais pour discuter avec vous. Vous pourriez m’être utile pour remettre de l’ordre dans certains coins de l’Empire.
– Mais… j’en serais honoré votre Sainteté ! Dit Philopé fier et gêné à la fois
– A bientôt messieurs dit l’Empereur pour clore cette entrevue. >>
Mathéo devait partir en avance pour préparer l’arrivée du souverain. Quelques minutes après le départ du chef de la garde impériale, Méros II remonta dans sa pogarde et le cortège partit. Pour cette fête, le véhicule restait sur la route. Tout se passait bien, la place où la cérémonie devait avoir lieu était à quelques dizaines de mètres, il ne manquait que l’Empereur. Soudain, la vitre du souverain éclata en mille morceaux, elle était pourtant conçue pour résister à de nombreux chocs. Méros II avait la tête en sang et était inanimé. Les deux policiers se jetèrent dans la pogarde et tentèrent de le réanimer, en vain. Sa femme sur le siège d’en face poussait des hurlements terribles. Il ne s’était passé que quelques secondes depuis l’accident et déjà, des dizaines de militaires, policiers et gardes impériaux étaient réunis autour du véhicule . Ils servaient littéralement de bouclier. Méric hurla :
<< MERDE IL EST MORT, L’ EMPEREUR EST MORT !>>
Top cette premiere partie!
Merci Isabelle 🙂